Des livres et des anecdotes : Le Problème de l’être et de la destinée
Nous sommes en 1905
Le 2 février, Bécassine fait sa première apparition dans le tout nouveau magazine La semaine de Suzette. Le physicien Albert Einstein publie, à 26 ans, sa théorie de la relativité restreinte. Le 9 décembre, Aristide Briand fait voter la loi sur la séparation de l’Église et de l’État en France. À la fin de 1905, on dénombre, en France, 21 523 voitures, dont 4627 pour le seul département de la Seine, alors que la Gironde n’en compte que 342.
1905 pour les spirites
Gabriel Delanne, fondateur de l’Union spirite franco-belge, et Charles Richet, le futur prix Nobel de physiologie et de médecine, se rendent à Alger pour assister à des apparitions et vérifier les phénomènes étranges qui se produisent chez le général Noël par l’intermédiaire d’une jeune médium, Marthe Béraud. Charles Richet en reviendra convaincu d’y avoir rencontré un fantôme en chair et en os. L’opinion se déchire à propos de cet éminent savant qui cautionnerait des phénomènes frauduleux et l’affaire, connue dans la presse sous le nom de « Villa Carmen », poussera Richet à créer une nouvelle discipline, la métapsychique, destinée à étudier et qualifier les phénomènes psychiques que la science ne peut expliquer.
A Paris, de 1905 à 1908, l’Institut Général de Psychologie réalise des expériences avec le médium Eusapia Palladino. Pierre et Marie Curie y participent activement.
En 1905, Rufina Noeggerath, âgée de 84 ans, doyenne des spirites de Paris, plus connue sous le nom de « Bonne maman », possède encore toute sa lucidité et sa force de travail. Auteur de plusieurs ouvrages, elle tient un salon, qui se réunit tous les mercredis, pour aider ceux qui souhaitent approfondir leur passion pour les sciences psychiques. Elle y reçoit tous les talents, toutes les sommités des arts et des lettres, adeptes ou proches du spiritisme. Ce sont ses qualités morales, sa bonté naturelle et son inépuisable charité qui lui ont valu son surnom de Bonne maman.
A l’occasion du congrès spirite de 1905 à Liège, Gabriel Delanne fait une conférence sur “l’Extériorisation de la Pensée”. De son côté, Léon Denis, durant cette année 1905, donnera cinq conférences, dont une à Liège, pour définir l’objectif essentiel du spiritisme afin de préparer l’avenir pour la jeunesse montante.
Son ouvrage
Le problème de l’être et de la destinée a, pour sous-titre, « Études expérimentales sur les aspects ignorés de l’être humain, les doubles personnalités, la conscience profonde, la rénovation de la mémoire, les vies intérieures et successives, etc. »
Dans les deux premières parties, sur le problème de l’être puis sur le problème de la destinée, Léon Denis aborde toute la problématique de notre existence sur terre. Puis, dans une troisième partie, il nous explique comment les surpasser grâce aux puissances de l’âme. Pour être complet, il ajoute ensuite une profession de foi du XXème siècle, ainsi que les rapides témoignages de cinq éminents scientifiques de l’époque.
Un succès international
L’ouvrage reçoit rapidement un franc succès, et pas seulement en France….
Miss Ella Wheeler Wilcox, qui en a fait la traduction anglaise en 1918, explique dans l’introduction du livre devenu « Life and Destiny » comment Mlle Camille Chaise, l’amie et élève du maître, lui a fait connaître les livres de Léon Denis. Profondément impressionnée par la beauté et la profondeur de l’ouvrage Le Problème de l’être et de la destinée, elle a demandé à Mlle Chaise de lui servir d’intermédiaire pour qu’elle en obtienne les droits de traduction. Elle est ensuite venue sur Tours pour rencontrer Léon Denis avant de finaliser l’ouvrage en anglais en 4 mois à peine.
Il faut préciser que la traductrice était veuve et que son défunt mari, par l’intermédiaire de Mme Soyer, une médium de Dijon, la pressait de terminer la traduction qui serait bénéfique pour le monde, mais aussi pour elle-même, grâce aux grandes vérités de la vie et de la mort que l’ouvrage contenait et qui l’aideraient dans son développement. Différents messages reçus du monde astral, à Dijon comme à Tour, se référaient à la traduction avec intérêt et approbation.
En offrant ce travail de Léon Denis au monde anglophone, Miss Wheeler Wilcox avait l’impression d’accorder une faveur inestimable sur chaque esprit intelligent capable d’amour, de sentiments, de douleurs, ou d’aspirations pour une plus grande compréhension de la vie. Pour elle, le travail de traduction de ces belles pensées a été une éducation à son esprit, une consolation pour son cœur, et une élévation de son âme. Lorsqu’elle s’en est ouverte à l’auteur, il lui a répondu : « Mais vous, depuis le temps que vous étudiez dans la recherche spirituelle, vous saviez sûrement déjà toutes ces choses ? » Ce à quoi elle avait répondu : « Oui, je les connaissais. Mais je me sens comme si vous étiez entré dans l’entrepôt de mon esprit, où ont été emballées des peintures inestimables et des statues rares, et c’est comme si vous les aviez prises une par une et que vous les ayez accrochées dans une claire lumière sur les murs de ma mémoire, puis placé les trésors sculptés sur des socles, pour le plus grand plaisir de mes yeux spirituels. Vous avez, en vérité, remis ma maison intellectuelle en ordre ».
La traductrice estimait que le travail de Léon Denis avait une valeur triple, car il s’adresse à la fois à ceux qui poursuivent la recherche psychique d’une manière purement scientifique, puis il s’adresse à ceux qui apprécient la littérature noble et émouvante et, enfin, il s’adresse à toute âme qui aime et croit en un Dieu assez grand pour être le Créateur suprême de cet univers magnifique.
Et, comme elle avait eu l’occasion de connaître Léon Denis, elle ajoutait que sa vie personnelle était en accord avec sa belle philosophie, ce qui ne peut pas être dit de tous les auteurs… De sa jeunesse troublée et douloureuse, il avait lentement gravi un chemin ascendant de difficultés, dépassé les obstacles et surmonté les douleurs, atteint la connaissance profonde et une grande éducation, et mis en pratique, au quotidien, les grands principes qu’il énonçait dans ce volume.
Ecoutons donc un passage :
« Il est assez difficile de faire entendre aux hommes que la souffrance est bonne. Chacun voudrait refaire et embellir la vie à son gré, la parer de tous les agréments, sans songer qu’il n’y a pas de bien sans peine, pas d’ascension sans efforts.
tendance générale consiste à s’enfermer dans le cercle étroit de l’individualisme, du chacun pour soi ; par là l’homme se rapetisse ; il réduit à d’étroites limites tout ce qui en lui est grand, destiné à s’étendre, à se dilater, à prendre l’essor : la pensée, la conscience, toute son âme en un mot. Or, les jouissances, les plaisirs, l’oisiveté stérile, ne font que resserrer encore ces limites, rendre plus étroits notre vie et notre cœur. Pour briser ce cercle, pour que toutes les vertus cachées s’épanchent au-dehors, il faut la douleur. Le malheur, les épreuves font jaillir en nous les sources d’une vie inconnue et plus belle. La tristesse, la souffrance nous font voir, entendre, sentir mille choses, délicates ou puissantes, que l’homme heureux ou l’homme vulgaire ne peuvent percevoir. Le monde matériel s’obscurcit ; un autre se dessine, vaguement d’abord, mais qui deviendra de plus en plus distinct, à mesure que notre regard se détache des choses inférieures et plonge dans l’illimité. »
Livres de …
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