Une mission délicate
Yvonne A. Pereira
La médium Yvonne do Amaral Pereira est l’une des personnalités importantes de l’histoire du spiritisme au Brésil. Porteuse d’une forte médiumnité, elle a dû apprendre très tôt à gérer les présences spirituelles dans sa vie. Elle a affronté la maladie et les perturbations provoqués par son potentielle. Elle a traversé son enfance et sa jeunesse au milieu des désincarnés et des souvenirs de son incarnation précédente, qui lui causaient des tourments parfois insupportables.
En se consacrant à la doctrine spirite, elle a exercé sa médiumnité avec noblesse et abnégation afin de mener à bien ses engagements assumés avant de revenir sur terre.
La mission
A la question 573, dans le livre des Esprits d’Allan Kardec, le monde supérieur définit ainsi la mission que choisissent certains Esprits en s’incarnant : « Instruire les hommes, aider à leur avancement ; améliorer leurs institutions par des moyens directs et matériels ; mais les missions sont plus ou moins générales et importantes ; celui qui cultive la terre accomplit une mission, comme celui qui gouverne ou celui qui instruit. Tout s’enchaîne dans la nature ; en même temps que l’Esprit s’épure par l’incarnation, il concourt, sous cette forme, à l’accomplissement des vues de la Providence. Chacun a sa mission ici-bas, parce que chacun peut être utile à quelque chose. »
Une vie antérieure
Ce médium dévouée, qui avait eu un passé douloureux, n’avait jamais pu s’adapter à une vie sociale collective. Elle travaillait chez elle, elle faisait des ouvrages de couture qu’elle revendait. Cela lui permettait de vivre.
Dans son existence précédente, au XIXe siècle, au Portugal, elle n’avait pas été une épouse fidèle et son attitude avait créé un climat propice aux angoisses. Suite à la mort prématurée de sa fille de sept ans et du décès de son mari, elle s’était jetée dans les eaux du Tage et s’était noyée. Elle avait éprouvé toutes les sensations angoissantes de l’immersion et de la décomposition du cadavre.
Elle portait, maintenant, dans sa mémoire spirituelle, les souvenirs de ces épisodes avec une lucidité impressionnante, ce qui augmentait sa difficulté à conserver un équilibre pour travailler en médiumnité.
Charles, un Esprit protecteur qui avait été son père dans cette existence en terre portugaise, l’avait prévenue que la solitude devrait être son chemin sur la Terre. C’était une épreuve nécessaire pour apprendre le désespoir auquel elle s’était abandonnée, en se suicidant. Par conséquent, dans cette incarnation au Brésil, elle avait besoin d’apprendre le respect de la vie par le renoncement et l’amour fraternel.
Le choix
Un jour, contrairement aux conseils de ses guides spirituels, Yvonne a commencé à développer des liens affectifs avec un garçon. L’apparente amitié a grandi au point que le jeune homme l’a invitée à dîner. Après le restaurant, tous les deux devaient allés voir un film au cinéma pour compléter l’agréable soirée.
Très excitée, elle s’est habillée simplement mais avec élégance. Elle était sûre qu’il serait un excellent compagnon pour un moment de détente sans grandes conséquences. Elle a vu en lui un air de bonne éducation qui l’a mise à l’aise. Nous sommes en 1920 et à cette époque, les jeunes hommes étaient très prudents lorsqu’ils approchaient une jeune fille pour essayer de la fréquenter.
Elle était sereine.
Le garçon s’est également préparé de manière convenable, ne négligeant pas les vêtements et le parfum qui feraient bonne impression. À l’heure convenue, il est allé la chercher chez elle et tous deux sont allés au restaurant. Il était un vrai gentleman.
Quand le dîner s’est terminé, ils ont pris tous les deux le chemin du cinéma. Lorsqu’ils sont arrivés à la porte du cinéma, le jeune homme a acheté les billets et s’est dirigé vers l’entrée de la salle de projection, suivi d’Yvonne.
À ce moment précis, l’Esprit Charles est apparu et lui a demandé :
– Où penses-tu aller ?
– Je vais voir un film, mon frère. Rien de plus, a-t-elle répondu.
– Tu es sûre qu’il n’y a rien à craindre ?
– Bien sûr. C’est un garçon poli et doux. Il n’a eu aucune attitude pour me manquer de respect.
– Malheureusement, ta naïveté est absolue… Après t’avoir offert le dîner, ne penses-tu pas qu’il va te demander autre chose ?
Yvonne a été surprise par les informations de son ami spirituel. Alors qu’elle conversait psychiquement avec Charles, le jeune homme a trouvé étrange qu’elle ne le suive pas pour entrer dans la salle de projection.
– Mais il me paraît être un bon garçon…
– Cependant, tu sais que les apparences peuvent être trompeuses et que tu dois être plus attentive aux circonstances de la vie. Même s’il s’agit d’une personne bien intentionnée, il y a longtemps que tu connais ton chemin dans cette existence. Nous sommes ici, les Esprits qui nous sommes engagés avec toi pour le travail de médiumnité, pour la tâche de perfectionnement et de renoncement que tu dois assumer. Par conséquent, je tiens à te dire que tu dois choisir. Si tu vas avec lui, nous n’irons pas avec toi. Notre engagement sera terminé et ici même, nous nous dirons au revoir.
À cet instant, le jeune homme comprenant que quelque chose d’étrange se passait, a insisté pour qu’elle entre dans le cinéma :
– Yvonne, ne veux-tu pas entrer ? a-t-il demandé avec anxiété.
Réfléchissant aux paroles de Charles, Yvonne a pris sa décision :
– Malheureusement, je ne pourrai pas t’accompagner ! Je viens de me rappeler que j’ai un ouvrage à livrer à un bon client aujourd’hui. À plus tard !
En disant cela, elle est partie très vite, sans se retourner, laissant un jeune homme qui ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Ils ne se sont plus jamais revus.
Le chemin de rédemption
En fait, Yvonne ressentait le manque d’un compagnon qui égayerait ses jours. Mais le mariage ne faisait pas partie de son programme de réincarnation. Elle devait transiter, sur terre, en maintenant une attitude de réflexion sur les valeurs de la vie conjugale et familiale.
Sa vie de célibataire, sa soif de tendresse et son dévouement à la cause du bien ont été un baume qui lui ont permis d’aller vers les chemins de son coeur et de se remettre des ombres du passé.
Yvonne do Amaral Pereira s’est désincarnée en 1984, laissant un héritage composé d’œuvres psychographiques de la plus haute qualité, dont l’extraordinaire livre Mémoires d’un suicidé. En outre, son amour pour les gens simples et pour les Esprits souffrants témoigne que l’engagement spirituel qu’elle avait pris. Elle a honoré toutes ses promesses et cela fait d’elle une personnalité vénérable et une authentique chrétienne.